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Landru à Vernouillet

En 1958, au cours de travaux effectués dans un jardin mitoyen de la villa “ The Lodge“, rue Paul Doumer, des ossements humains de deux corps furent déterrés créant une grande émotion dans le village. Il s’agit d’une femme et d’un enfant  La presse rappelle à cette occasion que la maison avait été occupée par Landru. 

            L’affaire Landru avait créé une grande émotion à l’époque. Landru accusé d’avoir assassiné plusieurs femmes fut surnommé le « Barbe-Bleue de Gambais ».

            Qui était Henri Désiré Landru ?

            Il est né é le 12 avril 1869 à Paris. Son père est chauffeur dans une fonderie et sa mère couturière. Il est élevé chez les Frères et officie comme sous-diacre à l’église Saint Louis en l’Ile. N’ayant pas les moyens de poursuivre des études, il travaille comme employé dans une étude d’architectes.      
            Il séduit sa cousine Marie Catherine Remy. Une fille, Marie, naît le 4 juin 1891. Landru la reconnaîtra deux ans plus tard. Il épouse Marie Catherine Remy. Trois autres enfants, Maurice, Suzanne et Charles, naissent de cette union.

            De 1893 à 1900, il change plusieurs fois de métier et commet ses premières escroqueries. D’escroquerie en escroquerie, opérant sous des faux noms, Il est plusieurs fois condamné à des peines de prison : 2 mois en 1904, 13 mois en 1906. En 1909, c’est sa première escroquerie au mariage : Suite à une annonce matrimoniale il fête ses fiançailles avec une veuve Jeanne Isoret et lui prend 10.000 Francs. Il est dénoncé par sa victime et condamné à 3 ans de prison ferme pour escroquerie.

            Dès sa sortie de prison, en 1914, il monte une nouvelle escroquerie : il achète un garage qu’il revend immédiatement sans avoir payé le premier propriétaire. Rapidement identifié par la justice, il est condamné par défaut à quatre nouvelles années de prison avec relégation, c.à.d. avec envoi au bagne de Cayenne. Mais il a disparu.

            Où est-il parti pour échapper à la justice parisienne ? À La Chaussée, près de Chantilly, où il installe sa maîtresse, Jeanne Cuchet et son fils André, auprès desquelles il se fait passer pour M. Diard, ingénieur. Elle avait répondu à une annonce ainsi formulée “ Veuf, deux enfants, quarante-trois ans, possédant un revenu confortable, affectueux, de bonne société, désire  rencontrer veuve, situation en rapport, en vue mariage “. Mais Diard tardant à vouloir la marier, elle le plaque et commence à douter. Elle se rend à Chantilly avec sa sœur qui, dès le début de leurs relations, l’avait mise en garde. Elle découvre que Landru était marié et retourne à Paris. Landru vient la relancer à son appartement et la convainc qu’il est en train de demander le divorce et la persuade de revenir à Chantilly. En décembre 1914, pensant probablement qu’il n’était pas assez en sécurité à Chantilly, Landru déménage avec sa compagne  à Vernouillet, où il loue la villa « The Lodge » sous une fausse identité.

             Et c’est là que commence la série infernale des femmes qu’il fera disparaître par le feu après s’être approprié leurs biens. Qu’un Parisien s’installe à Vernouillet n’a rien d’étonnant à cette époque. Les gens ne s’inquiètent pas de la présence de ce personnage qui de janvier à août 1915 aura eu 3 femmes différentes.  Nous sommes en 1915. C’est la guerre et les gens ont d’autres soucis que d’épier leur voisin ! À M. Friedmann, beau frère de Jeanne Cuchet qui vient les voir à Vernouillet, il raconte qu’elle effactue une mission secrète pour les forces armées et est en Angleterre ! Un mois plus tard, une nouvelle femme est vue dans le jardin de « The Lodge ». Il s’agit d’une veuve de 46 ans Thérèse Laborde Line d’origine sud américaine. Celle-ci avait vendu ses meubles et annoncé qu’elle allait vivre à Vernouillet, chez son fiancé. Cinq jours plus tard, elle disparaissait à son tour.

Désirée Guillin fut la victime suivante. Elle avait, elle aussi répondu à une annonce matrimoniale de Landru où il se présentait  comme un haut fonctionnaire en attente d’un poste de consul en Australie, cherchant une compagne pour l’accompagner. Elle vend ses meubles et le 2 août 1915, elle se rend à Vernouillet. Deux jours plus tard, elle disparaissait.  Ce n’est que plus tard lorsque Landru est arrêté que des témoignages affluent. Les gens se souviennent des épaisses fumées provenant de la villa. On parle de sorties nocturnes, de colis suspects. Selon un témoin, il a jeté une sorte de « grande malle qui brûlait en pétillant » et « dont se dégageait une mauvaise odeur ». Une certaine Madame Vallet fait même cette réflexion : « Ah ! mon Dieu ! serait-il entrain de brûler ses femmes ? Son mari, ancien boucher confirme l’odeur de chair brûlée qui émane des fumées de la villa.

4 personnes ont disparu à Vernouillet :

Jeanne Cuchet, lingère veuve de 39 ans d’un commerçant et son fils André 17 ans, vendeur dans une lingerie

Thérèse Laborde Line: veuve de 46 ans séparée de » son mari aubergiste

Désirée Guillin, 52 ans, ancienne gouvernante

            Landru a-t-il remarqué que ses agissements suspects intriguaient ses voisin ? Estimant que l’emplacement de « The Lodge » dans le village n’était pas suffisamment protégé des regards indiscrets, il quitte Vernouillet  en août 1915 pour Gambais, où il loue la villa Tric sous un autre faux nom, Freymet.

Carte postale de la villa de Landru à Gambais

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 Là, de décembre 1915 à janvier 1919, sept autres femmes disparaissent :

Madame Héon veuve de 55 ans, femme de ménage

Anna Collomb, veuve de 44ans, secrétaire dans une compagnie d’assurance

Andrée Babelay, 19 ans, domestique chez une cartomancienne

Célestine Buisson, veuve de 44 ans, femme de ménage

Louise Jaume, âgée de 35 ans, séparée de son mari, en instance de divorce

Anne Marie Pascal, divorcée âgée de 36 ans couturière

Marie Thérèse Marchadier, 38 ans, ancienne prostituée, tenancière d’une maison de passe à Paris.

            En 1918, plusieurs parentes des femmes disparues s’inquiètent et  écrivent au maire de Gambais. La police est alertée. Landru qui se cachait sous divers faux noms est arrêté le 12 avril 1919 à son domicile parisien, rue Rochechouart.

            L’enquête commence. On perquisitionne tant à Paris qu’à Vernouillet et à Gambais. On retrouve des meubles ayant appartenu aux victimes, mais aussi des débris  d’os calcinés dans un tas de cendre. Le carnet de Landru est aussi accablant.

            Le procès de Landru s’ouvre le 7 novembre 1921 devant la cour d’assises de Seine et Oise, à Versailles. Le procès va avoir un grand retentissement. Jusqu’au bout, malgré les charges accablantes, Landru niera tout. Entre autres, il s’exclame  «montrez moi les cadavres ! ». Son avocat ne peut lui éviter la peine de mort à laquelle il est condamné le 30 novembre 1921. Le président Millerand ayant rejeté le recours en grâce, Landru est guillotiné le 25 février 1922.        

à gauche The Lodge, maison où a habité Landru. À droite La Grand Rue vers 1900. On devine la maison The Lodge derrière les feuillages. 

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Dans cette tragique histoire, on peut être surpris de plusieurs éléments qui posent question.

  1. Les témoins qui ont vu la fumée et senti l’odeur ont certainement soupçonné des choses, mais ils ne se sont manifestés qu’au procès, six ans plus tard !
  2. On s’étonne que M. Friedmann, beau-frère de sa première victime et qui avait des soupçons sur son honnêteté, n’ait pas poussé plus loin ses recherches pour retrouver sa belle sœur, et n’ai pas alerté les autorités sur les agissements suspects de Landru
  3. Aucune de ses victimes, ni personne ne s’est étonné que cet homme dont la classe était mobilisable n’ait pas été incorporé, « comme tout le monde » en 1914. Il a passé toute la guerre, entre Vernouillet, Gambais et Paris sans être inquiété.
  4. À Gambais, comme à Vernouillet, aucune des personnes ayant témoigné avoir remarqué des agissements suspects ne s’est manifestée avant le procès.
  5. Les victimes étaient des femmes de condition modeste, à en juger par leur profession. Leur disparition n’a pas pu apporter à Landru des sommes considérables. On sait qu’il avait réalisé des titres appartenant aux victimes.Certains même avaient été réalisés par sa femme. C’est peut-être pour cette raison, qu’il y en a eu autant !

            Landru était-il fou ? En 1906, il avait pu sortir de prison grâce aux expertises de médecins psychiatres qui le déclarent « dans un état mental maladif qui, sans être de la folie, n’est plus du moins l’état normal » .

            On est étonné que le Vernolitains qui auraient observé le  comportement “anormal“ de ce parisien ne se soient pas inquiété d ‘avantage. La villa « The Lodge », située dans la rue Paul Doumer, était déjà à l’époque entourée de maisons et ce qui s’y passait ne pouvait échapper totalement aux regards des voisins. Peut-être est-ce la raison du départ de Landru pour Gambais car il n’est pas resté longtemps à Vernouillet. La découverte macabre de 1958 aurait pu, si elle avait été faite  à l’époque du procès, confondre Landru en lui montrant les deux cadavres que l’on a supposé être ceux de Jeanne Cuchet et de son fils. Mais d’après le médecin légiste, les corps trouvés à Vernouillet seraient ceux d’une femme d’environ trente ans et d’un enfant d’environ 10 ans, ce qui ne correspond pas.  Landru n’aurait il pas été le seul criminel ayant vécu à cet endroit ?